Protéger sans délai : l’Europe renforce sa législation contre les agressions sexuelles sur enfants

Le 17 juin 2025, le Parlement européen a adopté sa position sur la proposition de directive visant à aider les Etats de l’Union européenne à lutter plus efficacement contre les abus sexuels sur les enfants. En 2022, la Commission européenne avait estimé que la directive 2011/93/UErelative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie devait faire l’objet d’une évaluation afin de déterminer si ce texte était toujours adapté aux différents changements sociétaux et technologiques.

A l’issue de cette évaluation, elle soumettait une proposition de révision le 6 février 2024 afin d’intégrer les défis récents liés aux nouvelles technologies.

La directive introduit plusieurs évolutions notables : 

  • Une mise à jour des définitions harmonisées des infractions liées aux abus sexuels et à leur exploitation au niveau européen. Cela inclut l’adaptation aux nouvelles technologies, comme les contenus falsifiés réalistes simulant des abus sexuels sur enfants via la technologie d’hypertrucage (deepfake).
  • Des peines plus sévères pour plusieurs infractions liées aux abus sexuels sur les enfants, notamment en cas d’activités sexuelles impliquant un mineur ayant dépassé l’âge du consentement sexuel mais n’ayant pas consenti, au recrutement d’enfants à des fins de prostitution, à la possession ou la diffusion de contenus relatifs à des abus sexuels sur enfants, ou encore à la rétribution en échange de tels actes.
  • La suppression des délais de prescription pour les infractions visées par la directive afin de permettre aux victimes de disposer d’un temps de réparation illimité.
  • Une nouvelle définition du consentement spécifique aux enfants ayant atteint l’âge du consentement sexuel.
  • Un accompagnement gratuit des victimes, incluant les examens médicaux et médico-légaux, un appui à la constitution de preuves, des soins adaptés et un accès aux services de santé sexuelle et reproductive. Les députés souhaitent notamment que cet accompagnement s’inspire du modèle Barnahus (Maison des enfants). Ce modèle, introduit en Islande en 1998, coordonne les enquêtes criminelles et les enquêtes sur la protection de l’enfance menées en parallèle, rassemble tous les services compétents sous un même toit, et contribue ainsi à éviter la revictimisation de l’enfant.

La position du Parlement n’est toutefois qu’une étape. Avant son adoption définitive, la directive révisée doit encore être approuvée par le Conseil de l’Union européenne. Ces discussions constituent, en tout état de cause, un tournant décisif pour les Etats de l’Union européenne.

En France, le Sénat a adopté en première lecture, le 3 avril dernier, la proposition de loi du 3 décembre 2024 visant à renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants, en allongeant à trente ans contre vingt ans aujourd’hui, la durée de la prescription en matière civile en cas d’actes de torture, de barbarie ou de violences sexuelles commises sur un enfant, afin de l’aligner sur la prescription pénale.

Auteur – Sandy Fichaux – Juriste

Consentement : une notion désormais inscrite au cœur de la loi pénale

Le 18 juin 2025, le Sénat a adopté, à 323 voix pour, la proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles portée par les députées Véronique Riotton et Marie-Charlotte Garin.

Les parlementaires ont entendu élargir la définition du viol et des agressions sexuellesen réécrivant les articles 222-22 et 222-23 du code pénal, et en introduisant expressément la notion de consentement :

« Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise tout acte sexuel non consenti commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur.

Au sens de la présente section, le consentement est libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable. Il est apprécié au regard des circonstances environnantes. Il ne peut être déduit du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime.

Il n’y a pas de consentement si l’acte à caractère sexuel est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, quelle que soit leur nature (…) ».

Le viol est, par ailleurs, étendu aux actes bucco-anaux, qui relevaient auparavant des agressions sexuelles.

Comme le précisait le Conseil d’Etat dans son avis du 11 mars 2025 : «En consacrant dans la loi la notion centrale d’absence de consentement, la proposition de loi exprime clairement, tant dans la dimension préventive que répressive de la loi pénale, que les agressions sexuelles portent une atteinte au principe fondamental que constitue la liberté personnelle et sexuelle de chacun, qui doit être protégée, ainsi qu’au droit au respect de son intégrité physique et psychique par autrui. Cette reconnaissance explicite par la loi contribue à l’ancrage et à la pleine visibilité de cette exigence de consentement».

Cette proposition tend à faire évoluer la législation vers une culture du consentement, en écho aux actualités récentes (« Me too », procès Mazan, etc.) lesquelles avaient contribué à relancer les débats à ce sujet.

Autreur – Sandy Fichaux – Juriste

Prévention des violences sexuelles dans le sport : Un engagement local qui reste trop marginal

Malgré un engagement fort de notre part, aucune formation ni action de sensibilisation n’a pu être mise en œuvre cette année auprès des associations sportives du territoire de la SNA.

Nous avons pourtant multiplié les démarches : rencontres directes avec les clubs, relances par mailing, présentation publique de notre programme lors des Assises des associations en présence du maire, et entretiens avec la municipalité pour envisager un partenariat. Ces initiatives, soutenues par une subvention conséquente de l’Agence nationale du Sport, n’ont malheureusement pas trouvé d’écho, et aucune association ne nous a sollicités, malgré la gratuité de notre programme. Ce désintérêt est d’autant plus préoccupant que 11 % des violences sexuelles surviennent dans le milieu sportif.

Ce manque d’adhésion des associations du territoire reste préoccupant. Il y a deux ans déjà, lors de la présentation de notre programme au Comité olympique départemental, il avait été constaté que seuls deux clubs vernonnais avaient signé le manifeste de lutte contre les violences.

Un cadre légal en évolution, mais encore insuffisant

Le 11 juin 2025, le décret d’application de la loi visant à renforcer la protection des mineurs et l’honorabilité dans le sport a été publié.

Certaines mesures ont été prises : contrôle annuel obligatoire pour les éducateurs professionnels, élargissement du contrôle d’honorabilité aux bénévoles, dirigeants et arbitres (depuis 2022). Mais ces contrôles restent largement insuffisants :

  • Seulement 25 % des éducateurs font l’objet d’un contrôle a posteriori.
  • Le bulletin B2, actuellement exigé, peut voir certaines condamnations effacées sur simple demande, six mois après leur prononcé.

La proposition de loi portée par Sébastien Pla vise à renforcer ces mécanismes :

  • Alignement du contrôle d’honorabilité sur celui des secteurs social et médico-social.
  • Remplacement du casier judiciaire B2 par une vérification via le FIJAIS (Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes).
  • Obligation de signalement des situations suspectes par les clubs et fédérations.
  • Sanctions en cas de non-signalement par les dirigeants.

Qu’en est-il aujourd’hui ?  
À l’heure où les dispositifs législatifs se renforcent, l’engagement du tissu associatif local demeure trop timide : seuls trois clubs et la direction des sports de la ville sont signataires du manifeste de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Mais au-delà de cette signature symbolique, qu’est-il réellement mis en œuvre pour que les encadrants soient formés, que les jeunes bénéficient d’un espace de parole et que les parents soient sensibilisés ?    Nous le déplorons et appelons à une prise de conscience collective : la prévention ne peut être efficace sans une mobilisation concrète et active sur le terrain.

Nous espérons pouvoir fédérer autour de cette problématique lors de notre événement « Bouge-Toi », qui se tiendra le 16 novembre prochain. À cette occasion, une marche et une course solidaires seront organisées pour sensibiliser à la Journée mondiale de la protection des enfants contre l’exploitation et les violences sexuelles.

Protection de l’enfance : près de 90 professionnels formés entre avril et juin

Entre le 1er avril et le 10 juin, près de 90 professionnels ont été formés sur le territoire : éducateurs, assistants familiaux, enseignants, bénévoles associatifs, tous engagés au quotidien auprès d’enfants et d’adolescents.

Organisées avec le soutien de l’Académie de Normandie et du Département de l’Eure, ces formations ont rencontré un véritable écho auprès des participants. Tous ont déploré le manque de formation spécifique sur la question des violences sexuelles faites aux enfants, et ont exprimé une forte attente quant à la poursuite de ces dispositifs.

Parmi les besoins prioritaires identifiés :

  • Savoir accueillir la parole de l’enfant, sans l’influencer ni la nier ;
  • Être outillé pour rédiger un signalement clair, rigoureux et juridiquement fondé.

Ces modules ont permis non seulement d’apporter des connaissances essentielles sur la protection de l’enfance, mais aussi de favoriser les échanges entre professionnels venus d’horizons divers. Un véritable temps de réflexion collective autour d’une question de santé publique majeure, encore trop souvent taboue.

Nous tenons à remercier vivement nos partenaires institutionnels pour leur confiance et leur engagement aux côtés des acteurs de terrain.

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A propos

Association accueillant les enfants souffrant de l’inceste dans la région de Normandie

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Place Adolphe Barrette – Vernon

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07 69 67 35 84

Violences sexuelles : Plus de 800 élèves sensibilisés sur notre territoire

Éduquer, protéger, prévenir. Cette année, plus de 800 élèves, de la grande section de maternelle à la terminale, ont été accompagnés dans 10 établissements scolaires, publics et privés sous contrat, répartis sur les secteurs de la SNA, Louviers, Elbeuf et Bonnières-sur-Seine.

Si l’essentiel des actions de sensibilisation s’est déroulé dans les collèges, de nombreux enseignants du premier degré expriment aujourd’hui leur volonté d’agir à leur tour. Ils souhaitent bénéficier d’un accompagnement pour mettre en œuvre des séances adaptées, notamment dans le cadre du programme EVARS, dédié à la prévention des violences et à l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle.

Des chiffres alarmants qui ne laissent plus place au doute

La nécessité de cette mobilisation ne fait plus débat. Les données sont glaçantes :

  • 1 enfant est agressé sexuellement toutes les 3 minutes en France.
  • 3 enfants par classe sont victimes d’inceste.
  • 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 12 sont concernés, un chiffre qui tend à évoluer vers 1 garçon sur 7, non pas en raison d’une hausse des agressions, mais parce que les garçons osent davantage parler aujourd’hui.

Et ces violences n’épargnent pas l’école : selon les chiffres du ministère de l’Éducation nationale, 1 500 signalements de violences sexuelles sont faits chaque année en milieu scolaire. Un chiffre vraisemblablement sous-évalué, puisque la moitié des enfants victimes ne parleront jamais.
Une récente enquête intitulée « Tableau noir », publiée par la journaliste Aude Lorriaux, souligne un autre fait trop souvent ignoré : près de la moitié des auteurs de ces violences sont eux-mêmes mineurs, parfois âgés de moins de 13 ans.

Enfin, il est important de rappeler qu’un enfant est exposé à du contenu pornographique dès l’âge de 7 ans en moyenne, ce qui fragilise d’autant plus leur développement psycho-affectif.

Oser en parler pour mieux prévenir

Dans ce contexte, les établissements qui s’engagent dans des actions de prévention des violences sexuelles jouent un rôle fondamental. Nous les remercions sincèrement pour leur confiance.

Nous savons que ce sujet reste difficile à aborder, que la peur de mal faire ou de heurter est encore présente, chez les enseignants comme chez les familles. Mais il est aujourd’hui prouvé — et appuyé par de nombreuses recherches scientifiques — que la meilleure prévention reste la parole, quand elle est encadrée, adaptée et respectueuse de l’âge des enfants.

Une mobilisation nécessaire, un enjeu de santé publique

Oser parler des violences sexuelles faites aux enfants, c’est briser le silence qui protège les agresseurs. C’est permettre aux victimes de se reconstruire. C’est prévenir d’autres actes. C’est enfin affirmer que la protection de l’enfance n’est pas une option, mais un impératif collectif.